Retour sur la Lune

23 avr. 2019 / Victor Bomans

 

Lunar Orbital Platform-Gateway, image credit : NASA


Le 20 juillet de cette année 2019, la mission Apollo 11 et les premiers pas de l'Homme sur la Lune fêteront leurs 50ème anniversaire.  La dernière mission, Apollo 17, ayant eu lieu en 1972, aucun être humain n'a foulé le sol lunaire depuis quasiment un demi-siècle ! Un demi-siècle c'est ce qui sépare le premier vol motorisé des frères Wright des premiers avions de ligne à réactions ! Alors comment expliquer qu'on ne soit pas déjà partis à la conquête du système solaire ?

Simplement la fin de la guerre froide. Les coûts engendrés par les programmes spatiaux russes et américains ne pourraient être justifiés dans le contexte actuel. Les ressources financières et humaines de la NASA et de l'Union Soviétique étaient démesurées à l'époque de la course à la Lune.

Malgré tout on pourrait penser qu'il suffit de réutiliser les technologies développées à l'époque. En les améliorant un peu en tenant compte du progrès fait ces 50 dernières années ? Malheureusement, ce type de mission implique de nombreux sous-traitants et demande un savoir-faire qui n'a pas été entretenu. En effet, le personnel qualifié est parti à la retraite et aucun nouveau personnel n'a été formé. De plus l'évolution technologique n'aide pas beaucoup puisque le domaine du spatial utilise beaucoup de technologies uniques et développées pour des missions précises. Simplement, on peut se dire que, aucun programme lunaire n'ayant été mené depuis, les technologies en rapport n'ont pas beaucoup progressé. Seule une partie du problème, à savoir atteindre l'orbite, a fait l'objet d'un développement continu jusqu'à aujourd'hui.

Alors quand ? Dans les dix à vingt prochaines années grand maximum. Et pourquoi à ce moment ? Tout simplement parce que petit à petit, le développement des techniques spatiales nous permet de concevoir aujourd'hui des programmes lunaires faisant appel à des ressources réalistes. Enfin presque, car si des programmes lunaires voient le jour c'est aussi une question de concurrence. La concurrence poussant chacun à se dépêcher parce qu'actuellement les technologies ne sont pas encore prêtes... Mais de quelle concurrence parle-t-on ? Aujourd'hui de multiples gouvernements visent la Lune et je vous propose de passer en revue les deux principaux. La Chine et les États-Unis qui semblent entamer une nouvelle course à la Lune.

Le programme lunaire chinois

Le programme d'exploration lunaire chinois a débuté en 2003. Il porte le nom de "Chang'e". Celui-ci se veut progressif dans le but de se faire la main sur les différentes technologies nécessaires pour effectuer une mission lunaire habitée. Ainsi, depuis plus de dix ans, la Chine mène à bien son programme d'exploration qui se déroule sans accrocs.

La première mission Chang'e 1 a eu lieu en 2007. Avec Chang'e 2, ces deux premières missions ont eu pour but de cartographier la surface de notre satellite. La deuxième mission fut très similaire à la première. Cependant, la deuxième sonde chinoise a atteint plus rapidement la Lune et réalisé une meilleure cartographie en plus de servir par la suite pour tester certains appareils.

Les deux missions suivantes ont amenée le programme un pas plus loin. En effet, ces dernières consistaient en une analyse directement à la surface. Ainsi, la mission Chang'e 3 consistait en un atterisseur et un rover. Il s'agit du premier atterissage non destructif sur la Lune depuis 1976. Vint alors la mission Chang'e 4. Celle-ci avait pour but de servir de doublure en cas d'échec de Chang'e 3. Cette dernière étant un succès, Chang'e 4 eu alors pour mission de se poser sur la face cachée de la Lune. Et c'est donc le 2 janvier 2019 que la Chine fut le premier pays à poser un atterrisseur sur la face cachée de la Lune !

La suite du programme vise le retour d'un échantillon lunaire. Pour ce faire la mission Chang'e 5 T1 a testé en 2014 la capsule devant servir pour ramener les échantillons. Les deux missions principales du programme nommé, bien évidement, Chang'e 5 et Chang'e 6 serviront à ramener des échantillons lunaires. Chang'e 6 ayant pour objectif de mener la mission Chang'e 5 à bien en cas d'échec de celle-ci de la même façon que Chang'e 4 vis à vis de Chang'e 3 initialement.

La suite des missions aura pour but l'investigation de la surface lunaire. La Chine souhaite avec ses missions déterminer les endroits d'intérêts pour la construction d'un base lunaire sur base des ressources disponibles sur place. L'objectif final étant d'envoyer des hommes durant les années 2030. Dans cet ultime but la Chine développe un lanceur lourd dénommé `Longue Marche 9'. Cette fusée devrait posséder les mêmes performances que la "Saturn V" américaine.

Le programme lunaire américain

En 2004, le président George W. Bush met en place le programme Constellation. Celui-ci vise à envoyer aux environs de 2020 des astronautes sur la Lune pour des missions de longue durée. Dans ce but est développée la fusée Ares V devant reprendre le rôle qu'avait tenu la Saturn V. Ce lanceur aurait même du être plus puissant que son prédécesseur. Cependant le programme est arrêté par Barack Obama en 2010.

Arriva alors l'arrêt des navettes spatiales en 2011. Ainsi afin de pallier cette baisse des capacités de mise en orbite mais aussi pour maintenir les emplois des sous-traitants et des acteurs privés liés aux lancements des navettes, la NASA démarre le développement du SLS. Le SLS, pour Space Launch System, est un lanceur lourd dont le but principal est de maintenir le secteur économique anciennement lié à la navette spatiale en bonne santé. D'autre part, la NASA s'est tourné vers les entreprises privées pour assurer une partie des capacités de mise en orbite américaine.

L'objectif du SLS durant toute l'administration Obama était d'envoyer des hommes sur Mars. Le changement de présidence suivant s'est lui aussi accompagné d'un changement de directive pour la NASA. En effet, suite à l'arrivée de Trump à la maison blanche, l'agence américaine revoit ses plans d'exploration. Ainsi, l'objectif est de retourner sur la Lune pour aller plus loin, notamment sur Mars. Le but est donc bien d'explorer le système solaire en particulier Mars mais en se fixant l'objectif plus réaliste de commencer par retourner sur la Lune de façon permanente.

Afin de retourner sur la Lune, la NASA envisage un retour progressif. Pour cela, l'agence américaine souhaite placer une station spatiale en orbite lunaire. Cette dernière servirait d'intermédiaire pour atteindre la surface lunaire. Baptisée initialement "Deep Space Gateway" en accord avec cette philosophie de retourner sur la Lune pour "aller plus loin". Elle fut néanmoins renommée "Lunar Orbital Platform Gateway" remettant ainsi la Lune au centre du programme d'exploration américain.

Le 24 septembre 2018, la NASA a publié une feuille de route de son programme d'exploration lunaire. Ce calendrier provisoire est divisé en 2 parties. Une première concernant l'orbite lunaire et une seconde à propos de la surface. La NASA prévoit à ce moment de construire sa station orbitale durant la décennie 2020-2030 avec un premier module lancé en 2022. Quant à l'exploration en surface, l'agence américaine souhaite faire appel au secteur privé pour desservir du matériel sur la Lune et ce en 2019. L'objectif à ce moment est de ramener des hommes à la surface de notre satellite en 2028. Et les américains semblent de plus en plus pressés. Il y a quelques semaines, le vise-président américain a ainsi déclaré que les États-Unis souhaitaient ramener des hommes sur la Lune en 2024 !

C'est n'est donc pas pour tout de suite, mais différentes agences gouvernementales semblent ainsi faire preuve d'un regain d'intérêt pour l'exploration lunaire ! Et même si les prochains pas sur la Lune ne seront peut-être que dans une dizaine d'années, dans les années qui suivent entreront en service plusieurs lanceurs lourds et des missions d'envergure auront lieu dont la mission de retour d'échantillon Chang'e 5 et le lancement du premier module de la future station orbitale "LOPG" !

 

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